PAR SÉBASTIEN SERGENT
C’est son histoire. Franck* est un joueur de poker. Il écume les tables de cash- game des cercles de jeux parisiens depuis plus de vingt-cinq ans. Et même si on les appelle clubs de jeux aujourd’hui, il a du mal à se défaire de ses habitudes de langage.
Après quarante ans de bons et loyaux services dans son petit commerce, rue des Pyrénées dans le 20e arrondissement de Paris, Franck a transmis les rênes à son fils depuis quelques années. À l’époque, il aimait aller jouer au poker pour se détendre et casser les codes d’un quotidien très conventionnel. « Deux fois par semaine en moyenne », nous dit- il, les yeux pleins de souvenirs. Personne ne jouait dans sa famille. C’est un ami à lui, Patrick*, qui lui fit franchir l’entrée d’un cercle de jeux la première fois. C’était au début des années 1990.
Il découvre le Texas Hold’em quelques années plus tard, à l’Aviation Club de France et ses tournois à 1 000 francs. Une passion est née. « J’ai même acheté des livres, alors que je n’en avais jamais lu un de ma vie », plaisante-t-il. L’aspect stratégique du jeu le passionne, l’aspect psychologique encore plus. Les années passent et Franck a ses habitudes, mais il reste fasciné par la richesse de ces établissements de jeux. « Des lieux formidables, un vrai melting-pot socioculturel. Ce sont plus que des casinos ou des clubs de jeux, ce sont des lieux de rencontre, de vie. »
« PLUS DE MAINS, PLUS D’ACTION »
2012. Mazagan Beach Resort, à quelques kilomètres de Casablanca au Maroc. Franck s’est qualifié pour un tournoi de poker via un site de jeux en ligne. Carré contre quinte flush, l’expérience fut de courte durée. En attendant ses amis toujours en lice, il fait le tour du casino. Il cherche une roulette, voire une machine à sous, ce sont les seuls autres jeux qu’il connaît. Arrivé dans une grande salle, dédiée aux jeux traditionnels, il y aperçoit une connaissance parisienne, assis à une table d’Ultimate Poker.
Franck reste une vingtaine de minutes derrière la table et observe chaque geste des joueurs et du croupier. Il en profite également pour poser des questions à son acolyte. Il est tout de suite attiré par la vitesse de jeu et l’adrénaline qui en découle. Il est séduit. « J’adore le rythme d’une partie d’Ultimate. En cash-game et en tournoi on peut parfois rester de très longues minutes à attendre une main décente pour jouer. Là, on peut jouer toutes les mains, et chaque coup dure 90 secondes. »
Depuis c’est l’amour fou. Mais il devra attendre 2018 pour voir son nouveau jeu favori débarquer à Paris, grâce à la nouvelle législation sur l’offre de jeux autorisés dans la capitale, et les nouvelles réglementations des désormais clubs de jeux. Avant cela, il a visité les casinos français et européens afin de retrouver les sensations de jeu que le No Limit ne lui offrait plus.
« COMME UN HEADS-UP CONTRE QUELQU’UN QUI JOUE TOUTES LES MAINS SANS REGARDER SES CARTES »
Aujourd’hui à Paris, il s’en donne à cœur joie. Full, carré, quinte flush, Franck a déjà connu le bonheur de la plupart des meilleures combinaisons de poker. Il ne lui en manque qu’une seule. La plus belle de toute: la quinte flush royale. « Je ne prendrai pas ma retraite tant que je ne l’aurai pas touchée ! » On le croit sur parole. Les bonus sont les pépites de ces chercheurs d’or. Jusqu’à 500 fois la mise.
Au-delà de l’adrénaline générée par le rythme endiablé de ces parties, Franck apprécie la facilité d’apprentissage du jeu. « C’est le No Limit en version facile, contre un seul adversaire (la banque) qui joue toutes les mains à l’aveugle », nous répond-il quand on lui demande de nous décrire le jeu en deux mots.
Il estime que son passé de joueur de poker lui confère un avantage évident dans son combat pour battre la banque. « Je sais quand miser et je sais quand jeter », nous dit-il, sûr de lui. Franck nous explique d’ailleurs qu’il se sent plus à l’aise à l’Ultimate Poker.
« L’avantage à l’Ultimate, c’est qu’on contrôle ses pertes. Dans le pire des cas, je peux perdre au maximum l’équivalent de 6-7 blindes d’un coup, contrairement au No Limit, où il est arrivé à tout le monde d’en perdre 200, voire plus, sur une seule et même main. »
Son téléphone vibre, c’est son ami Patrick. Il lui donne rendez-vous au restaurant du Club. Depuis vingt- cinq ans, Franck a fait de nombreuses rencontres et noué de belles amitiés. D’ailleurs, il nous précise avec malice qu’à l’Ultimate, les joueurs jouent « ensemble contre la banque, et non les uns contre les autres ».
Franck nous salue. Il est temps pour lui de retourner à son jeu favori. Nous avons rencontré Franck au Club Pierre Charron, dont il nous dit apprécier le professionnalisme de l’équipe et la cuisine du chef. Merci à lui d’avoir partagé ses passions. Hier, le poker, et aujourd’hui l’Ultimate. Quelle sera celle de demain ?
Et même si la banque finit toujours par gagner, Franck sera éternellement riche de ses amis et de ses histoires. Son histoire.
* Afin de préserver leur anonymat, les prénoms des joueurs ont été modifiés.